Article du carnet de bord

Les Pléiades à Toulouse

Des bulles au Capitole

Toulouse en fêtes...

Le week-end dernier, Les Ailes du désir étaient à Toulouse pour visiter l’exposition anniversaire des 30 ans des FRAC et ont également profité des premières festivités de Noël : le soleil aidant (le vin chaud aussi), l’ambiance était surchauffée malgré une température très basse…

Pour commencer notre périple toulousain, une visite s’imposait au BBB, centre d’art qui accueille et produit des œuvres d’artistes actuels et développe des actions de médiation comme en témoigne l’accueil enthousiaste que nous a réservé la médiatrice des lieux. Vincent GANIVET y a réalisé une sculpture/structure selon les principes de construction autoportante qu’il avait déjà utilisés cet été au château de Magnac-Lavalette (Charente) à l’invitation du FRAC Poitou-Charentes, mais en tenant compte du contexte local : à Toulouse, la structure est en briques roses comme la majorité des constructions de la ville.

 

En parallèle, « Le geste premier » est une exposition dédiée au dessin, aux relations sensibles, intuitives comme aux élaborations conceptuelles dont il est le fruit et l’objet ; pour relier cette exposition à la sculpture de Vincent Ganivet, celui-ci y présente Vaisselle, une vidéo où il crée des sculptures éphémères avec des objets de la vie domestique par le biais de la pression du jet d’eau du robinet.

 

 

Nos amateurs ont particulièrement apprécié le travail du poitevin Thierry MOUILLE, Dérives partiales, une vidéo qui révèle une pensée mathématique qui se dérobe et se construit par disparitions successives.

Vision historique au Château d’eau, pôle photographique de Toulouse ; édifié au début du 19ème siècle, le lieu déjà est remarquable par son architecture qui a des airs de petit Château Saint-Ange ; abandonné vers 1870, il doit sa renaissance à l’initiative de Jean Dieuzaide qui en a fait la plus ancienne institution européenne exclusivement consacrée à la photographie. L’exposition actuelle y est consacrée au photographe lituanien Algirdas SESKUS qui, dans les années 70-80, a marqué un phénomène nouveau bousculant la photographie de l’époque ; mais ces images n’ont pas été comprises et subirent la censure soviétique. Cadres brouillés, composition aléatoire, esthétique « amateur », l’artiste dépasse la technique documentaire pour laisser entrer la mémoire.

En contrepoint, le Château d’eau a invité le jeune photographe Julien CHAPSAL qui s’est investi dans le quartier populaire du Mirail à Toulouse et fait dialoguer des images du bâti et des photos de jeunes du quartier : un double regard qui dépasse aussi la réalité documentaire.

 

 

 Centre d’art, le Musée des Abattoirs est aussi le lieu d’hébergement du FRAC Midi-Pyrénées ; à ce titre il accueille en ce moment, pour les 30 ans des FRAC, les propositions développées par les 23 FRAC à l’occasion de cet anniversaire : nous y avons bien sur retrouvé une mise en espace de Heidi WOOD pour quelques œuvres ou traces d’œuvres du FRAC Poitou-Charentes, mais aussi un ensemble d’œuvres issues de toutes les régions brossant un panorama de la création artistique en France depuis les années 80 étayé de quelques pièces historiques. L’exposition Les Pléiades laisse une place à un ensemble de pièces installées par Guillaume LEBLON, choisies dans la donation Daniel Cordier déposée en permanence aux Abattoirs.

 

Peu de temps restait pour visiter la ville, mais certains se sont rendus au musée des Augustins, installé dans un ancien couvent qui constitue un écrin aéré par deux cloîtres pour les collections médiévales et des beaux-arts, avec quelques chefs-d’œuvre, du Pérugin à Rubens, de Murillo à Delacroix en passant par Ingres, Manet, Toulouse-Lautrec, Corot, Courbet, Vuillard…

La plupart des amateurs ailés ont pu visiter la Fondation Bemberg, installée dans l’hôtel d’Assézat depuis une quinzaine d’années, une superbe collection de peintures et sculptures mais aussi de meubles et d’objets, qui donne le vertige : entre autres, Cranach, Clouet, Brueghel, cinq tableaux de Tintoret, trois de Véronèse, un Titien, et pour la collection moderne, plus de trente toiles de Bonnard, parmi des tableaux de Pissarro, Matisse, Renoir, Degas, Gauguin, Villard, Picasso… Un ensemble exceptionnel qui permet aussi de redécouvrir des artistes un peu négligés en ce moment, Dufy, Vlaminck, Marquet, Signac…

Au détour des rues du centre-ville, une pause à la belle librairie Les ombres blanches, une visite de la basilique Saint-Sernin, haut-lieu de l’art roman, et le regret de ne pouvoir entrer dans l’impressionnante église des Jacobins en travaux.

En passant place du Capitole entre les effluves d’aligot et de vin chaud, on pouvait rejoindre une autre fondation, certes plus modeste – trente et une pièces -, celle de la Caisse d’Epargne qui présentait sa collection Les cadavres sont exquis : commencée en 2005, elle revisite le célèbre jeu des surréalistes. L’écrivaine Maryline Desbiolles a « répondu » au dessin de Jean Le Gac, le peintre Gérard Titus-Carmel au texte de Maryline…

Pour compléter le paysage artistique toulousain, le petit groupe des Ailes a assisté samedi soir au Théâtre Garonne, à une représentation de Fauna, écrit et mis en scène par Romina Paula, un spectacle de la compagnie argentine El Silencio (maintenant à Paris dans le cadre du Festival d’automne). De petits détails matériels ont quelque peu gâché le plaisir de la représentation, que ce soit l’inconfort des sièges ou surtout la difficulté à lire le sur-titrage ; les thématiques abordées – la relation entre le metteur en scène et son actrice, la question du « genre »… - n’ont guère passionné nos amateurs, malgré la qualité du jeu des acteurs et la fluidité de la mise en scène.

Avant de reprendre le train dimanche soir pour revenir à Poitiers, arrêt à la médiathèque José Cabanis, intégrée dans l’Arche Marengo (qui abrite aussi l’INA) édifiée en 2004 par les architectes Buffi associés ; une fréquentation dominicale énorme malgré le soleil et les festivités de Noël, partout des gens lisent, écoutent de la musique, visitent l’exposition Nino Ferrer, écoutent un « concert dessiné »de haute tenue, travaillent…

Est-ce le soleil et la lumière, le vin chaud ? Toulouse nous laisse de bons souvenirs et l’envie d’y revenir ; et ainsi de découvrir d’autres lieux autour de la ville qui permettraient sans doute aussi de belles rencontres artistiques.