Article du carnet de bord

Le marathon de Paris !

à la galerie Perrotin

Une vingtaine d’amateurs se sont retrouvés début octobre à Paris pour un week-end bien rempli.

Pour démarrer le samedi, marathon dans les galeries, elles sont fermées le dimanche. Un tour dans l’exposition historique que la galerie Templon consacre au peintre Georges MATHIEU, qui connut son heure de gloire dans les années 60 ; le responsable de la galerie fait resurgir en nous des souvenirs d’enfance mais surtout explique le regain d’intérêt pour cet artiste ; à quelques pas de la galerie traditionnelle, Daniel Templon a ouvert un nouveau lieu, très bel espace avec verrière, et présente une exposition de l’artiste sénégalais Omar BA ; ici aussi, une galeriste nous introduit dans l’univers du peintre, sa démarche mêlant  métaphores personnelles et références ancestrales : africains surtout sénégalais dans la seconde guerre mondiale, figure de la mère disparue…

Remontant la rue Rambuteau, nous atteignons le Centre Culturel suisse ; Shirin YOUSEFI y propose un beau travail sur l’histoire des Koulbars, tandis qu’Alexandra BACHZETSIS, artiste liée à la danse et au théâtre, développe une installation qui fait regretter de ne pas y voir la performance pour laquelle elle a été créée.

 Petit casse-croute chez le dernier roi du falafel et du tarama du quartier avant de se diriger vers la rue Turenne ;  la galerie Perrotin présente Otto, une exposition/installation de Laurent GRASSO, questionnement sur le pouvoir des ondes, qui s’articule autour du film éponyme.  La galerie Karsten Greve propose un accrochage d’automne réunissant plusieurs artistes qui travaillent avec des matériaux humbles et fragiles, papiers découpés, débris et poussière, dessins délicats ; l’autre galerie voisine de Karsten Greve s’ouvre sur l’œuvre du peintre chinois QIU SHIHUA, Impressions, une quinzaine de toiles monochromes blanc révélant pourtant une  multitude de nuances et de transparences.

Quittons le Marais pour le Père-Lachaise du côté de Charonne, à la découverte de l’Espace Monte-Cristo ; ce lieu appartient à la Fondation Villa-Datris, qui dispose d’un site exceptionnel à l’Isle-sur-Sorgue où sont présentées chaque été des expositions non moins exceptionnelles que nous visitons depuis Avignon ; l’espace Monte-Cristo est dédié à la présentation de la collection de la fondation et présente aussi des expositions temporaires, en ce moment Sculptrices, regards sur le monde ; Pauline, coordinatrice de l’Espace Monte-Cristo, nous a réservé un accueil chaleureux : après avoir fait le tour de l’exposition temporaire où nous avons retrouvé quelques artistes vus à la villa Datris, elle nous présente les œuvres de la collection permanente actuellement exposées et organisées autour de la thématique de la Sculpture cinétique, cœur de la collection, des pièces qui souvent témoignent de l’esprit ludique et curieux des créateurs. Il nous faut malgré tout quitter ce lieu intime et convivial où nous reviendrons, c’est sûr, pour rejoindre notre rendez-vous à l’Opéra Bastille avec Tristan.

Car c’était l’objectif essentiel de ce week-end à Paris, la reprise de ce Tristan et Isolde dans la mise en scène d’un homme de théâtre d’avant-garde, Peter SELLARS, en collaboration avec le vidéaste Bill VIOLA ; l’opéra est conçu comme un oratorio, évitant l’écueil de la représentation faussement réaliste au profit d’une épure allant à l’essentiel de la symbolique ; nous restons figés devant les belles images métaphoriques de Bill Viola, l’eau et le feu, et les éléments…  La distribution est à l’avenant, la direction de Philippe Jordan nous emporte…  Mais nous n’avons pas l’habitude d’une telle durée de représentation (5h et quart), et malgré les deux entractes, nous subissons la fatigue liée à notre départ matinal de Poitiers et à notre déambulation dans les expositions ! La plupart sont trop fatigués à la sortie pour courir les évènements de la Nuit Blanche, un petit concert par-ci par-là leur suffit ; et puis de nombreuses manifestations se déroulent à guichets fermés.

Pas de repos le dimanche, on commence à la Fondation Vuitton ; ceux qui ne connaissent pas le lieu s’enthousiasment pour l’architecture même si le temps pluvieux ne permet pas de bénéficier des points de vue depuis les terrasses. Mais à l’intérieur les expositions font oublier ces désagréments !

Deux expositions en hommage à deux artistes tous deux morts à 28 ans, l’un au début du XXème siècle, l’autre à la fin ; pour Egon SCHIELE, cette rétrospective propose de redécouvrir la rupture qu’il a représentée et qui préfigurait  un monde de conflits. Plus proche de nous, Jean-Michel BASQUIAT témoigne avec sa violence des errements de notre société, et la rétrospective témoigne de l’ampleur de sa vision.

Respirons un peu au 104, toujours animé le dimanche : le grand espace est traversé par des danseurs et des musiciens en tout genre, tous animés d’un enthousiasme débordant ; l’exposition Metaphoria – de métaphore et euphorie – offre un voyage dans l’imaginaire, jouant sur le champ séparant ce qu’une œuvre laisse voir de ce qu’elle nous évoque, ouvrant des chemins et des mises en relation uniques entre œuvres, artistes et public.  La constellation poétique  Eridanus, de David HORVITZ, a particulièrement séduit nos amateurs, ainsi que les deux moulages de Hans-Peter FELDMAN, Adam et Eve.

Dernière étape de ce marathon au Centre Pompidou : mais après Basquiat, la figure de l’art autrichien Franz WEST n’a pas emporté l’enthousiasme de nos amateurs ; l’exposition est sans doute d’un grand intérêt historique mais n’a guère touché leur sensibilité fatiguée…

Malgré cette ambiance de marathon, on revient à Poitiers frustré : il y a tant d’évènements qu’on aurait voulu voir… Mais on a accumulé assez de souvenirs pour attendre un prochain week-end à Paris !